mardi 9 juin 2009

Pellicule Argentée


"Depuis longtemps, j'ai envie de filmer des adolescents, mais en évitant la nostalgie et la sociologie qui sont les deux écueils de ce genre de film. "Jamais cour n'a eu tant de belles personnes". Tout a débuté avec ces quelques mots de Mme de la Fayette, mots qui ont entraîné dans mon esprit l'idée d'une autre cour, celle d'un lycée parisien, avec d'autres belles personnes, la jeunesse d'aujourd'hui. Cette jeunesse grave et gracieuse, qui m'apparaît si éloignée de ma jeunesse des années 80, dont je garde le souvenir net d'une absence résolue d'élégance. (…) Je voulais les filmer eux, ceux d'aujourd'hui, avec cette part inévitable de distance que leur mystère m'impose. Je voulais filmer leur manière de faire avec un monde qui les agresse, les considère toujours plus ou moins comme des ennemis (…) et dans le même mouvement les désigne comme objets de désir et en fait les canons de la beauté d'aujourd'hui (…) L'adolescence va bien à La Princesse de Clèves."

Christophe Honoré



La Belle Personne

Souvenez-vous… L’étonnante beauté de Mademoiselle de Chartres en faisait tourner plus d’un en bourrique. Son mari, le prince de Clèves était fort jaloux, en particulier du (séduisant) Duc de Nemours (un homme passionné, le Duc de Nemours, vraiment très passionné).

Dans cette adaptation libre et moderne de La Princesse de Clèves, c’est Léa Seydoux qui tient le rôle principal (« C’est doux », dirait un comédien que je ne nommerai pas, le soir où l’actrice était nominée pour le César du Meilleur Espoir Féminin 2009). La belle personne, a priori, c’est elle.

Léa Seydoux interprète joliment Junie, une jeune fille qui arrive dans un nouveau lycée quelque temps après la mort de sa mère. Son cousin Matthias et ses amis la prennent sous leur aile, et elle finit par sortir avec le plus calme d’entre eux, Otto. C’est d’ailleurs le jeune Grégoire Leprince-Ringuet (Les Égarés, Les Chansons d’amour) qui incarne l’amoureux meurtri. Entre eux, Nemours, prof d’italien de son état qui, d’abord fasciné par Junie, en tombe rapidement (fou) amoureux, alors que c’est contre ses habitudes.

Évidemment, parce que c’est l’un des meilleurs jeunes acteurs de notre époque et parce que Christophe Honoré ne peut plus se passer de lui, c’est Louis Garrel qui endosse le rôle de Nemours (Dans Paris, Les Chansons d’amour, lui aussi). Et une fois de plus, on se régale de le voir jouer, cet acteur si profond.

La Belle Personne, malgré son beau casting, reste un film modeste. On apprécie l’apparition de Chiara Mastroianni qui fut dans le temps une Princesse de Clèves, elle aussi (La Lettre). Sont également remarquables le merveilleux jeu de Louis Garrel et la chanson poignante interprétée par Grégoire, et écrite par Alex Beaupain, l’éternel compagnon de Christophe Honoré (qui a, vous l’aurez deviné, composé pour Les Chansons d’amour). Bref, un film touchant qui a su garder sa simplicité.

Christophe Honoré évoque dans cette adaptation d’autres sujets, qui ne sont pas forcément dans le roman de Mme de la Fayette, comme l’homosexualité et le suicide. En revanche, on note des similitudes avec l’histoire d’origine : le refus au bonheur ; le portrait photographié de Junie que dérobe Nemours qui rappelle fortement le Duc de Nemours volant celui de Mademoiselle de Chartres ; l’amour puissant d’Otto pour Junie qui lui sera fatal comme cela l’a été avec le Prince de Clèves ; et enfin, la lettre commune aux deux versions, objet de quiproquo entre les amants et la Cour (ou la classe).

Je n’ai qu’une question, à toi, Madame-Monsieur le Lecteur… Si tu as déjà vu ce film (ou quand tu l’auras vu, si ce n’est pas encore fait), j’ai une question à te poser : selon toi, qui est véritablement la belle personne ?


La ptite Clo

2 commentaires:

  1. Clo ou l'art de nous faire découvrir les petits trésors enfouillis. Un article magnifique. Me reste plus qu'à trouver le film. ^^

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