samedi 15 février 2014

Éditorial

Bienvenue pour ce nouveau numéro du PAen, le journal écrit (avec amour) par des plumes pour des plumes. Toute l'équipe remercie affectueusement l'auteur Fabrice Emont pour avoir répondu si gentiment et si sincèrement aux questions de notre intervieweuse !

Pour cette formule nationale du 15 févier 2014, vous trouverez au programme :

- À vos claviers : Dragonwing sélectionne amoureusement les concours et les appels à texte du moment.
- Dessine-moi une Plume : Saïph nous plonge dans l'art plein de romantisme d'Albert Bierstadt.
- Citations d'auteur : Shaoran partage avec vous ses phrases coups de cœur.
- Les Inspirateurs : Saïph vous fera adorer l'escrime avec la poursuite de son épopée de l'épée.
- Paroles de Pro : Shaoran a interviewé Fabrice Emont, l'auteur du saint-valentinesque Dis-moi qu'il y a un ouragan !


>> Une version PDF du PAen est téléchargeable ici


Astuce : Faite un peu défiler la page qui s'affiche et cliquez sur

Vous y trouverez des contenus bonus, alors pourquoi vous en priver ? Toute l’équipe vous souhaite une bonne lecture !


Cristal et Saïph, rédactrices en chef

A vos claviers

Alors les Plumes, j’espère que ce PA-NoWriMo ne vous laisse pas trop sur les rotules ! Comment ? Il y a des gens dans le fond qui n’y participent pas ? Encore mieux ! Puisque je vous sens pleins de courage et d’ardeur ce mois-ci, voici ma nouvelle sélection de concours et d’appels à texte, tous frais sortis du four !

 




[Concours] #JEDI14 (Jeunes Écrivains Déchaînés et Innovants)
Lien : www.concoursjedi.fr
Organisateurs : ONPrint et DraftQuest, deux startups parisiennes du Labo de l’édition.
Particularités du concours : JEDI est un concours de « nouvelles enrichies » ! ONPrint est une plate-forme qui permet d’enrichir vos textes de contenus multimédias (musiques, vidéos, sites web, calendrier…) afin de créer un texte enrichi. DraftQuest est un outil qui se veut la solution à l’angoisse de la page blanche. Le concours existe pour introduire les auteurs en herbe à l’utilisation de ces deux sites.
Genre littéraire : Tous.
Thème : « Roadtrip ».
Longueur : 4 à 8 pages.
Modalités de soumission : Pas de frais de participation. Envoi par mail.
Date maximum de soumission : 9 mars 2014.
Bénéfices : Le premier prix consiste en un iPad mini et l’édition de votre livre chez Edilivre. Le second prix est un tracker FitBit Flex, et le troisième un bon d’achat de 50€ à la Fnac. Tous les autres participants reçoivent des goodies.

[Concours] Cercle Pieussan Joseph Delteil
Lien : http://www.bonnesnouvelles.net/cerclepieussanjosephdelteil2014.htm
Organisateur : Le cercle Pieussan Joseph Delteil.
Genre littéraire : Tous.
Thèmes : « Vivre, c’est faire un bouquet » (catégorie adulte) ou « Ce que tu rêves, fais-le » (catégories jeune). La phrase doit figurer dans le texte et résonner dans l’esprit de l’œuvre.
Longueur : Maximum 10 pages.
Modalités de soumission : Pas de frais de participation. Envoi par mail.
Date maximum de soumission : 1er avril 2014.
Bénéfices : Le gagnant de la catégorie adulte recevra une dotation de 300€ ainsi que l’édition de son livre chez Edilivre. Le gagnant de chacune des deux catégories jeune recevra une dotation de 150€.

[Concours] L'Encrier Renversé
Lien : http://reger.canalblog.com/
Organisateurs : La revue de nouvelles « L’Encrier Renversé » et la ville de Castres.
Genre littéraire : Tous.
Thème : Libre.
Longueur : Maximum 15 pages (soit 22 500 signes).
Modalités de soumission : Pas de frais de participation pour les moins de 18 ans, sinon frais de 5€ payables par chèque. Envoi par courrier en 4 exemplaires.
Date maximum de soumission : 15 mai 2014.
Bénéfices :
- Premier Prix : 800 € ; Second Prix : 350 € ; Troisième Prix : 250 €.
- Un prix indépendant de 150 €.
- Les dix premiers textes seront publiés dans le numéro « Spécial concours 2014 » de L’Encrier Renversé. Les lauréats de la 4e à la 10e position en recevront un exemplaire gratuit.

[Appel à Textes] Nouvelles noires du rail (réservé au moins de 25 ans)
Lien : http://nouvelles-noires-du-rail.e-monsite.com/
Organisateurs : L’association « Les Picrates » et la SNCF Limousin.
Genre littéraire : Policier.
Thème : L’univers ferroviaire.
Longueur : Entre 5 et 10 pages, soit entre 10 000 et 30 000 signes.
Modalités de soumission : Pas de frais de participation. Envoi par mail ou par courrier.
Date maximum de soumission : 30 avril 2014.
Bénéfices : Les 5 meilleures nouvelles seront publiées sans droit d’auteur dans un recueil diffusé gratuitement sur le réseau SNCF Limousin. L’auteur de la meilleure nouvelle se verra en outre remettre une bourse de 1 000€.

A vos claviers !

Dragonwing

Dessine-moi une plume

Finies les têtes de gondole et les farandoles de roman Fantasy et SF. Retour aux sources et aux charmes discrets des étagères consacrées à la philosophie, à l'histoire et aux divers sujets tous dignes d'intérêt. Tiens, oserais-je présenter ce livre ? Il en existe plusieurs éditions, mais cette couverture est vraiment belle par son illustration. D'ailleurs qui en est l'auteur ?  

L'artiste du jour



Couverture d'Albert Bierstadt

Aujourd'hui nous parlerons des travaux empreints d'aventure et de grands espaces d'Albert Bierstadt.

L'Homme

Albert Bierstadt est né en 1830 en Allemagne (qui n'était pas encore l'Allemagne à l'époque), mais très rapidement sa famille immigra aux États-Unis, dans le Massachusetts précisément. Il revint en Allemagne pour ses études et étudia à Düsseldorf avant de retraverser l'Atlantique pour partir en expédition. Ces voyages lui permirent de sillonner le pays et de peindre et de photographier de nombreux paysages montagneux qu'il retransposait sur toile une fois de retour à l'atelier.
Si au sommet de sa gloire, sa vie était des plus aisées, son travail passa de mode et il finit sa vie à New York dans la misère.

L'artiste

Comment rester de marbre face à la profondeur, à la vraisemblance, à la promesse d'escapade et à la richesse de ces peintures ? La couverture de "Ainsi parlait Zarathoustra" ne rend pas entièrement justice au travail d'Albert Bierstadt puisque le tableau est tronqué et rougi par un filtre. Regardez donc l'une de ces toiles et vous serez fascinés, happés par ces mondes empreints de poésie.
Allez, une image vaut mieux qu'un long discours :




Paysage d'après Albert Bierstadt

 Ces montagnes majestueuses, cette lumière contrastée, ces nuages comme un prolongement de la roche, cette profondeur qui invite au voyage, les sentez-vous ? La grandeur du rêve américain est là, les détails des arbres et des animaux peuplent l'imaginaire. La peinture à l'huile rend justice à ces souvenirs de voyages. Partirons-nous à sa suite ? Avec le même regard affuté, Albert Bierstadt peint les humeurs de l'eau, les troupeaux qui voyagent librement dans les contrées sauvages, la vie des colons. Mais toujours vous trouverez la présence du minéral comme un fondement, une signature de son travail.

Je vous invite donc à aller explorer ce site anglophone sur Albert Bierstadt ou tout simplement à chercher grâce à votre moteur de recherche.

Votre dévouée,

Saïph

Citations d'auteur

« Certains ne deviennent jamais fous... Leurs vies doivent être bien ennuyeuses. »

de Charles Bukowski

 

« Le monde se divise en deux catégories de gens : ceux qui lisent des livres et ceux qui écoutent ceux qui ont lu des livres. »

de Bernard Werber (Extrait de Les Thanatonautes)

 

« On raconte que le battement d'une aile de papillon à Honolulu suffit à causer un typhon en Californie. Or, vous possédez un souffle plus important que celui provoqué par le battement d'une aile de papillon, n'est-ce-pas ? »

de Bernard Werber

 

« Il y a deux réponses à cette question, comme à toute les questions : celle du poète et celle du savant. Laquelle veux-tu en premier ? »
 

de Pierre Bottero (Extrait de Le Pacte des MarchOmbres, Tome 1 : Ellana)

 

« Quand on écrit, on peut faire tout ce qu'on veut : les personnages, les détails, l'intrigue... Au cinéma, il n'y a que des contraintes : problème d'argent, de sensibilité, de taille. »
 

de Jean-Christophe Grangé (Extrait d'une interview sur Evene.fr - Avril 2007)

 

« Ce sont rarement les réponses qui apportent la vérité, mais l’enchaînement des questions. »
 

de Daniel Pennac (Extrait de La Fée carabine)

 

« Un ivrogne, ça raconte n’importe quoi, surtout la vérité. »
 

de Daniel Pennac (Extrait de La Fée carabine) 

Les Inspirateurs

Bien le bonjour, gentes Dames et gentils Seigneurs. Les épées vous manquent ? Connaitre juste les attentes militaires, leur anatomie et leur histoire vous a laissés sur votre faim ? Je vous propose donc de poursuivre ce voyage et de découvrir la symbolique, les épées historiques ainsi que tous les dérivés européens de l'épée.


Les épées : suite de l'épopée

Petit rappel : "L'épée une arme qui répond à un besoin militaire et physique."
On demande à une épée d'être maniable, relativement souple afin de mieux absorber les coups et d'être tranchante ou piquante selon les époques.
L'épée, c'est trois grandes parties. La garde, la lame et le fourreau. Je ne rappellerai à votre mémoire que cette lame va être plus fine et tranchante au bout (le faible). Et plus large près de la garde (le fort).
Je me permets de vous rappeler aussi les termes d'estoc (piqué) et de taille (coupe).
Nous voilà parés pour la suite !

La symbolique de l'épée

L’épée n’est pas qu'une arme. Au-delà de son aspect martial, de nombreuses symboliques entourent cet objet. Dès le début de son existence (âge du Bronze : 2000 ans avant JC), elle sert aussi comme outil religieux et se retrouve décorée, gravée voire même incrustée de pierres.
Bien sur, quand nous pensons au symbole par excellence de l'épée, nous répondons tout d'abord : le symbole phallique. D'autre pourrait dire aussi : La croix. Ce qui n'est pas faux, mais plus récent.
Alors reprenons dans l'ordre.

Symbole phallique et masculin par excellence dans la plupart des cultures, l'épée représente :
- Des valeurs guerrières telles que la bravoure, la force, la puissance mais aussi le sacrifice.
L'épée est l'arme qui cherche à rétablir l'harmonie et la paix grâce à la soumission à une volonté. Si l'épée est le symbole du pouvoir guerrier et de la force, le fait de "donner l'épée", représente le "don du pouvoir". Les Rois de France ont eux mêmes utilisé cette symbolique en se faisant remettre l'épée de Charlemagne, Joyeuse, ainsi que les éperons dorés lors de l'adoubement royal.
De plus des symboles sont aussi attribués aux différentes parties de l'épée. La sagesse est associée à la poignée, le courage au pommeau, la force à la lame et la justice à la garde.

- Des valeurs sacrées. Depuis l'avènement de la religion chrétienne, l'épée incarne aussi le pouvoir du Verbe. On la retrouve à la main de l'archange Michel, du chérubin lors de l'exil d'Ève et d'Adam et dans de nombreux autres passages de la Bible. Plus tard elle aura aussi la symbolique de la croix, outil de la passion du Christ.

- Des valeurs judiciaires. La déesse romaine Justitia ou Thémis a les yeux bandés, tient une balance dans une main et l'épée de Némésis dans l'autre. Cette lame représente le fait de séparer la culpabilité de l'innocence et ainsi la capacité à juger. Là aussi, la lame est à double tranchant car la justice peut s'exercer aussi bien en faveur qu'au détriment des parties en désaccord.


La Justice et son épée

- Des valeurs liées à la connaissance. Eh oui, regardez nos académiciens. Dans la tenue officielle se trouve une épée en plus de l'habit vert, des bottes vernies et du chapeau à plumes d'Immortel. Là encore il y a tout un rituel. Comme le dit si bien Henri Lavedan, « La garde est un rébus flatteur, la sous-garde une charade, la branche un acrostiche, le quillon un trait d’esprit. La «fusée» exprime le départ, les débuts brillants, l’ascension rapide, et le pommeau, ferme comme une tête à cervelle, présente le chef-d’œuvre de la maturité — généralement personnifié par une femme en casque.»

Les épées historiques et de légendes.


Toutes les citer dans un article, le PAen ne suffirait pas. Je vais donc en évoquer trois et vous laisserais le loisir de découvrir celles qui peuplent aussi bien les légendes arthuriennes que celtique et arabe.

Hal'Gebrik
Cette épée forgée en Inde fut conquise par Alexandre et retrouvée au IVe siècle par Diophante d'Alexandrie. Le perse Al-Khawarizni s'en empare au IXe siècle et la rebaptise Ar'Ithme (l'inconnue). En 1746, le sultan en fait cadeau à l'encyclopédiste d'Alembert pour l'avoir soulagé d'un calcul rénal différentiel. Elle est depuis lors au musée de l'Académie Française et est réputée pour donner la bosse des maths. Pour tout ceux qui sont encore à l'école, c'est peut-être l'occasion d'allez la voir !

Joyeuse
C'est l'épée de Charlemagne puis du sacre des rois de France. Selon la légende, elle portait dans son pommeau de nombreuses reliques, dont celle de la Sainte Lance. La ville de Joyeuse (Ardèche) lui devrait son nom. Un des lieutenants de Charlemagne aurait retrouvé l'épée égarée sur un champ de bataille. En récompense il reçut une terre en Ardèche et un nouveau nom, Joyeuse.
L'épée du sacre exposée au Louvre, est un assemblage d'éléments disparates. Les oiseaux affrontés au pommeau seraient du Xème-XIème siècle, les dragons adossés et le filigrane aux quillons de la seconde moitié du XIIème siècle.


Joyeuse

Tizona
L'épée du Cid fut enterrée avec lui. Elle appartenait au chevalier Castillan Rodrigo Diaz de Vivar, connu sous le nom « El Cid Campeador ». Tizona mesure 93 centimètres de longueur depuis la poignée jusqu'à la pointe et pèse un peu plus d'un kilo. Sa lame mesure 4,3 centimètres de large. Elle symbolise l'honneur militaire du héros. Colada était l'autre épée du Cid, qu'il gardait également comme un trésor.

La famille des lames.

Je n'ai parlé jusqu'à présent que de l'épée, mais croire qu'il n'existait que cette arme et qu'elle n'a pas évolué est une erreur. Face à la profusion des lames, je me bornerais à une liste détaillée.
- Le Messer, vient de l'Allemand "couteau" est une arme médiévale avec une protubérance au niveau de la garde. Elle sert aussi bien de protection, de "coup de poing" que d'accrochage pour des techniques de désarmement. L'équivalent français est le fauchon.
- La Claymore est une large et grande épée à une main et demie ou 2 mains qui était utilisée par les guerriers écossais. Elle est apparue au XIVème siècle et mesure environ 1,30 mètre de long soit 1 mètre de lame pour 30 centimètres de poignée. Cette poignée se distingue par 2 branches longues souvent terminées par un trèfle à quatre feuilles.
- La Rapière est une épée longue et fine, à la lame flexible, à la garde élaborée, destinée principalement aux coups d'estoc. Même si elle n'est pas faite pour trancher un homme en deux, la rapière est affûtée, et peut causer de sérieuses entailles si un coup à la volée atteint l'adversaire. La Rapière fut rapidement associé à une main gauche (dague) d'abord par les écoles italiennes puis dans le reste de l'Europe. La lame est d'ailleurs de section triangulaire ou losangique. À force d'évolution, elle donnera naissance à l'épée de cour, une arme de duel ne permettant que les piqués.
- Le Sabre est emblématique des armées napoléoniennes dont on utilise la pointe et le tranchant. Généralement courbe, il ne possède qu'un seul tranchant ce qui le distingue de l'épée. Ainsi l'autre bord permet d'être saisit et d'appuyer un coup ou d'engager des désarmements. Il faut distinguer le sabre de cavalerie qui est plus lourds que le sabre d'infanterie, mais les deux restent plus longs que le sabre briquet, arme des Voltigeurs.


Sabre et son fourreau


Il reste tant de chose à dire sur l'épée et son évolution, ses techniques, ses maitres et j'en passe. Mais je pense que vous êtes dorénavant armés pour rendre justice à cette arme blanche et la mettre en lumière au gré de vos envies.

Saïph

Paroles de Pro


Coucou les plumes,

Au menu de ce nouveau numéro, PaNoWriMo oblige, le forum s’est plongé dans son ambiance la plus studieuse. Les auteurs en herbe rivalisent d’imagination, les mots fusent, les thèmes inspirent et chacun donne le meilleur de lui-même pour faire avancer ses histoires. Alors quoi de plus logique que d’aller fureter du côté d’un véritable auteur pour glaner quelques précieux conseils ?

J’ai donc choisi un auteur que nous connaissons tous, j’ai nommé Fabrice Emont. Mais si, réfléchissez, Fabrice est l’un des finalistes du fameux concours premier roman de Gallimard Jeunesse. L’un des concurrents de notre Cricri nationale, et auteur du très bon « Dis-moi qu’il y a un ouragan », disponible dans toutes les bonnes librairies. En exclusivité sur PA, il accepte de répondre à nos questions.


1- On a tous en nous ce petit grain de folie que certains décident un jour de développer. Que ce soit au travers de la musique, du dessin ou encore de l’écriture, on a tous nos raisons de prendre la plume et monter au créneau. Quelle a été la vôtre ? J’écris depuis que j’ai 7 ou 8 ans. Je savais par mon éducation que les livres étaient une belle chose mais je n’aimais pas lire ; par contre, j’ai toujours aimé « créer » et inventer des choses. Je dessine parfois, je joue un peu de piano (très mal). L’idée d’écrire un roman a donc toujours été là, ponctuée de tentatives… jamais achevées. Certes, j’écrivais des poèmes (obscurs) et des nouvelles, dont certaines sélectionnées dans des concours. Mais, à vrai dire, à plus de 36 ans, au moment où l’affiche du concours Gallimard Jeunesse m’est tombée sous les yeux, j’étais sur le point d’abandonner l’idée d’essayer de publier ou même d’écrire un roman. D’ailleurs, devant l’affiche, j’ai hésité, et c’est surtout poussé par l’énergie du désespoir que je me suis dit : « Si ce n’est pas cette fois, ce ne se sera jamais ! » J’ai regardé les conditions : « Public de lecteurs de 9 à 18 ans. 18 + 9 = 27, divisé par 2, cela fait 13,5. Donc je pourrais écrire sur un personnage de 14-15 ans… » Et là a surgi dans ma tête l’image d’une adolescente que je venais de voir à la caisse de la supérette quelques minutes plus tôt : j’avais mon héroïne. Le lendemain matin, la première phrase est venue pendant que j’écoutais la radio dans ma salle de bains, puis je suis parti à l’aventure en n’ayant qu’un but : avoir écrit une histoire complète d’au moins 120 000 signes pour le 31 août. La date butoir m’a beaucoup aidé, car elle « matérialisait » la fin, la ligne d’arrivée du marathon.

2- En tant qu’auteur, a fortiori débutant, on voit toujours les maisons d’édition comme une forteresse imprenable pleine de dragons à visage humain et de magiciens du papier. Mais à votre avis, est-ce aussi terrible qu’on le dit ? L’édition est une industrie culturelle. Donc, il y a la partie culturelle, artistique, où règne l’émotion, le ressenti de ceux qui lisent et de ceux qui écrivent, et il y a la partie industrielle, où les considérations techniques et économiques priment. Les individus qui participent à la « chaîne du livre » sont ainsi pris entre ces deux feux, ce qui n’est pas toujours facile. Et comme tout milieu, celui de l’édition peut avoir tendance à se replier sur lui-même... Mais tous les éditeurs que j’ai rencontrés m’ont paru plutôt sympathiques et ouverts d’esprit. En tout cas, aucun ne crachait de feu ! Et il n’est pas vrai que seul le copinage permette de se faire publier. Christelle Dabos, Philippe Laborde et moi en avons fait l’expérience, car nous étions tous les trois aussi surpris d’avoir été sélectionnés par Gallimard Jeunesse. Si on a tendance à voir les maisons d’édition comme des forteresses surnaturelles, c’est peut-être surtout parce que l’écriture est notre part de magie à nous, et qu’il n’y a pas de magie digne de ce nom sans quelques monstres et sorciers à terrasser…

3- En tant que membre de Plume d’Argent et fan-club officiel de Christelle Dabos, nous avons suivi de très près l’évolution du concours premier roman de Gallimard, dont vous étiez également finaliste. Félicitations. Comment vit-on dans la peau d’un finaliste ? La peur au ventre ou l’extase du challenger au sommet de son art ? Quand j’ai lu le texte de Christelle, j’ai tout de suite su qu’elle allait être la gagnante, parce que son texte me semblait avoir un souffle épique, une ampleur imaginative et une richesse descriptive avec lesquels il est bien difficile de rivaliser. Donc, pas suspense de ce côté-là. Quelques commentaires de candidats déçus sur Internet qui disaient que mon texte, au langage pas toujours très orthodoxe, sonnait la « mort de la littérature jeunesse » étaient assez troublants, quoique amusants, au fond. Ce que je me demandais surtout, c’était si quelques jeunes lecteurs et lectrices se reconnaîtraient dans ce que j’avais écrit. J’ai eu la plus charmante des réponses à cette question en découvrant qu’une jeune fille avait créé un blog pour faire connaître mon texte, parce qu’elle s’était reconnue dans Léa, la narratrice du roman. Quant à être au « sommet de son art », ma manie de la réécriture fait que je ne suis jamais entièrement content de ce que j’ai écrit. Ainsi, entre la version mise en ligne pour le concours et la version papier qui va sortir en librairie, je n’ai pu m’empêcher d’apporter au texte mille petites modifications (sans changer l’histoire, bien sûr)…

4- Aujourd’hui Gallimard décide de vous faire confiance en publiant votre roman. Une belle récompense pour conclure une belle aventure. Mais en a-t-il toujours été ainsi ? La rédaction de « Dis-moi qu’il y a un ouragan » a-t-elle connu les jours de pluie, la page blanche ou encore les doutes ? J’écrivais au jour le jour, sans avoir une idée précise d’où j’allais. Je me laissais porter par la voix de Léa, en intégrant des éléments trouvés ici et là. Parfois les suggestions venaient de mots tirés aux sorts (par un générateur aléatoire inclus dans le traitement de texte que j’ai programmé pour mon usage), le meilleur exemple étant le titre du livre, purement aléatoire mais qui m’a guidé jusqu’à la fin. Parfois c’est une personne croisée dans la rue qui m’inspirait : le grand-père de Léa est « né » d’un imposant Breton barbu que j’ai vu en grande discussion dans une petite voiture noire avec une ado qui devait être sa petite-fille. Et ainsi de suite. Tout allait bien jusqu’au chapitre 11, où a surgi le gros blocage. Jusque-là, l’histoire était du genre fantastique, avec une sorte de créature qui, à la manière d’un vampire, aspirait l’énergie vitale – c’est pourquoi, au départ, le personnage de Quentin était maigre et pâle. Mais je me suis aperçu en plein milieu du livre que je n’étais pas du tout convaincu par cette idée et que je ne trouvais pas de développement qui me donnait envie de continuer à écrire. Pendant deux jours, j’ai désespérément cogité pour déterminer quelle nouvelle direction prendre, comment faire à nouveau fonctionner l’histoire. Et c’est quand j’ai décidé de remplacer la magie par l’amour et la poésie, donc d’écrire un récit « réaliste » et non fantastique, que tout s’est débloqué. Mais là encore je ne suivais pas de plan précis, juste un « arc » en sept étapes (la méthode exposée par la prof d’arts visuels dans le roman est à peu près celle que je suis ; cela m’amusait d’écrire un roman sur une histoire en train de s’écrire, et de tester si ma « théorie » pouvait donner un résultat concret). Le texte final n’avait rien à voir avec ce que j’avais imaginé au départ, mais il s’était développé de manière « organique » sur le terreau des idées abandonnées et de souvenirs fugitifs. Ensuite, il y a eu d’innombrables réécritures. Le regard critique de ma sœur m’a accompagné tout le long du processus, car elle lisait les chapitres au fur et à mesure et me donnait son avis. Puis Gallimard m’a fait quelques suggestions de modification avant la mise en ligne. Et enfin, j’ai passé un mois à réécrire pour la publication papier. Le temps de beaucoup douter encore.

5- À l’heure d’Internet et des nouvelles technologies, l’autopublication devient une arme de choix dans l’arsenal de l’auteur débutant, est-ce que cette aventure vous a déjà tenté ? Non. J’aime l’idée d’un « filtrage » professionnel, d’un regard extérieur sur le texte. Le texte est l’œuvre d’un seul, mais un livre gagne souvent à être le résultat d’un travail d’équipe, toute cette chaîne qui va de l’auteur au libraire ou bibliothécaire en passant par l’éditeur, le correcteur, le graphiste, l’imprimeur…

6- À l’aube de la sortie du livre, prévue le 13 février de cette année, envisagez-vous de donner une suite aux aventures de Léa, ou préférez-vous plutôt céder à l’appel du tout beau tout neuf ? Je ne sais pas trop. Le personnage de l’arrière-grand-père de Quentin m’intéresse, et je me demande s’il n’aurait pas laissé quelque aventure ou quelque secret à Zombiville pour que Léa et ses amis aient de quoi se distraire tout en préparant le bac de français. J’ai d’ailleurs écrit deux versions d’un premier chapitre… Mais je n’ai pas l’horizon aussi dégagé qu’avant, car il s’agit de partir de personnages et d’un contexte qui existent déjà, pas de les imaginer et de les remodeler au fur et à mesure que j’écris. Et je n’ai pas de date butoir pour me motiver… Si je croise des lecteurs et lectrices en dédicaces, peut-être qu’ils me donneront des idées, pour une suite ou pour quelque chose de tout à fait différent. En écriture, je me fie au hasard et je laisse les mots écrire.

7- Mon petit doigt m’a dit que l’observation de la vie quotidienne influait beaucoup sur votre façon d’écrire. Est-ce selon vous nécessaire pour rendre une histoire crédible ? Faut-il absolument se dissocier de ses personnages, ou laisser notre propre personnalité à travers eux ? Plus que sur l’observation précise, je m’appuie sur la cueillette d’éléments disparates dans la réalité qui m’entoure. Par exemple, le nom de famille de Léa, Calvino, vient du fait que mes yeux sont tombés sur les livres d’Italo Calvino dans ma bibliothèque. Et comme je l’ai dit, le personnage de Léa est lui-même né d’une adolescente dont le survêtement flashy et l’air pensif m’avait surpris tandis que je payais mes courses à la supérette du coin. Quelques minutes plus tard, j’ai vu l’affiche du concours Gallimard et je me suis dit : « Et si j’écrivais l’histoire d’une jeune fille qui aime courir et qui réfléchit beaucoup. » J’avais connu quelqu’un de sportif et pensif, et des traits de personnalité d’autres personnes sont venus s’y greffer. L’idée n’est pas de copier la réalité, mais de lui offrir un miroir. « Mentir vrai », comme disait Aragon (je crois). J’ai des points communs avec les principaux personnages du livre, mais aucun n’est moi. Écrire, c’est parler de ce qui nous tient à cœur, de ce qui nous émeut, laisser venir les sentiments profonds, piocher dans nos souvenirs, mais sans les recracher tels quels, sinon ce n’est pas ni très créatif et ni très amusant à faire. Je n’ai jamais aimé les sujets du genre : « Racontez vos vacances. » Certes, je me suis un peu documenté en écrivant, j’ai lu ce qui se racontait sur des blogs et des forums destinés aux adolescents et j’ai visité des sites Internet de lycées, mais tout cela restait très secondaire par rapport à la dynamique qui animait les personnages. Suivre les désirs des personnages, c’est l’essentiel.

8- On vous sait désormais auteur, mais il n’en a pas toujours été ainsi. Exception faite de son talent pour la langue de Molière, comment devient-on correcteur ?Le mieux est de suivre une formation à ce métier. Il y a celle du Centre d’écriture et de communication, à Paris. Et, sans doute la plus complète, celle de Formacom. Les filières éditions des universités doivent aussi dispenser une petite formation à la correction. Mais il faut savoir que c’est un métier où l’on ne fait pas fortune et où il y a peu de places à prendre (et sans doute de moins en moins). Il demande aussi d’être un peu obsessionnel, d’avoir une culture générale assez diversifiée, et de douter de tout. Il s’agit de vérifier non seulement l’orthographe et la syntaxe, mais aussi la typographie, de vérifier les faits, de veiller à la cohérence du texte, et de fluidifier le style, si besoin… Ce que je préfère personnellement, c’est la révision de traduction, parce qu’il y a cette tension entre le texte traduit et l’original qu’il ne faut pas trahir sans y rester collé non plus.


9- Quels seraient vos conseils à de jeunes écrivains en devenir désireux de s’améliorer ?Lire en essayant de comprendre comment fonctionnent les textes des autres, idem en regardant un film ou une série. Écrire en s’amusant. Douter après avoir écrit. Réécrire. Et montrer ses textes. Les faire lire hors de son cercle familial, en participant à des concours de nouvelles ou de poésie, à un atelier d’écriture, à une communauté en ligne comme Plume d’Argent, ou même pratiquer quelques jeux littéraires entre amis (par exemple, tirer cinq mots au sort et tenter de les placer dans un texte écrit en une demi-heure chrono, puis on se lit le résultat obtenu ; pour avoir des idées de jeux, écoutez les Papous dans la tête sur France Culture). Parallèlement à cela, pour prendre un peu de recul théorique et essayer de comprendre pourquoi un texte « marche » (ou pas), on peut étudier quelques manuels d’écriture. « Il n’y a pas de “il faut” en art », comme disait le peintre Kandinsky, mais il est bon de connaître les règles du jeu auquel on joue. Au cours des années, j’ai donc potassé divers manuels d’écriture (de fiction et de scénario), pour la plupart écrits par des Anglo-Saxons… Ceux-ci ont une approche beaucoup plus artisanale et « terre à terre » de l’écriture. Si l’anglais ne vous fait pas peur, je vous recommande :
- Characters and Viewpoint, de O.S. Card ;
- Crafting Scenes, de R. Obstfeld ;
- Word Painting, de R. McClanahan (sur l’art de la description) ;
- Writing for emotional impact, Karl Iglesias ;
- From where you dream, de Robert Olen Butler, basé sur les cours de creative writing (à visée « littéraire ») qu’il donne à la Florida State University. Et allez jeter un œil sur son expérience vidéo (non sous-titrée, hélas) où on le voit écrire une nouvelle et commenter son propre processus d’écriture depuis l’idée initiale jusqu’au texte fini : www.fsu.edu/~butler/
Et en français :
- Anatomie du scénario, de John Truby ;
- Écrire le scénario, de M. Chion ;
- Le guide du scénariste, de C. Vogler (je n’ai pas directement lu celui-ci, mais seulement les travaux d’anthropologie dont il s’inspire).
Et pour voir une expérience d’atelier d’écriture récente en français : http://www.lesnouveauxtalents.fr/category/ateliers-d-ecriture/


10- Sur une note un peu plus fantaisiste, tout auteur traîne dans ses placards des cadavres de feuilles ou autres cahiers agonisants, témoins gênants ou émouvants de nos débuts d’écrivain, parlez-nous un peu du « Fédéral Bureau des Oursons Secrets »… Il y a un petit garçon de 8 ans qui attendait cette question depuis 30 ans ! J’ai d’ailleurs retrouvé ce premier texte il n’y a pas longtemps. Ses principales caractéristiques étaient des bruitages sous forme d’onomatopées d’une ligne ou deux, des méchants trafiquants de drogue à l’accent colombien très prononcé, et beaucoup d’action, dont une remarquable cascade où le héros, mon ours en peluche, sautait d’un avion pour atterrir sur un autre avion, le tout en plein vol bien évidemment. Ce que j’écris aujourd’hui est beaucoup plus calme…
Le roman de Fabrice Emont maintenant en librairie

Et voilà Plumettes et Plumeaux, c’est déjà fini. Nous remercions chaleureusement Fabrice Emont pour sa participation, sa sympathie et ses réponses sincères. Pour celles et ceux qui souhaiteraient découvrir plus en détails sa plume, je vous invite à consulter le site internet de Gallimard jeunesse, ou à feuilleter les pages de son livre « Dis-moi qu’il y a un ouragan » qui est sorti le 13 février.

A bientôt pour un nouveau Paroles de Pros.
C’était Shao déjà en quête d’interviews inédites
Shaoran