mardi 15 octobre 2013

Editorial

 
Bienvenue pour un nouveau numéro du PAen, le journal écrit par des plumes pour des plumes. Toute l'équipe remercie chaleureusement Valentine, libraire chez l'Arbre à lettres, pour avoir répondu aux questions de notre intervieweuse !

Pour cette formule nationale du 15 octobre 2013, vous trouverez au programme :

- À vos claviers : Dragonwing sélectionne les concours et les appels à texte du moment.
- Dessine-moi une Plume : Saïph s'est penchée sur le monde foisonnant de Laurent Gapaillard.
- Citations d'auteur : Shaoran donne la parole aux grands classiques.
- Les Inspirateurs : L'épée, beaucoup plus qu'une arme : Saïph en apporte la preuve.
- Paroles de Pro : Shaoran a interviewé pour vous une libraire parisienne !
- Spécial Festival du livre : Cristal fait le compte rendu du Salon du livre de Mouans-Sartoux.
Une version PDF du PAen est téléchargeable ici !
Astuce : Faite un peu défiler la page qui s'affiche et cliquez sur

Vous y trouverez des contenus bonus, alors pourquoi vous en priver ? Toute l’équipe vous souhaite une bonne lecture !


Cristal et Saïph, rédactrices en chef

À vos claviers

Nom d’une manivelle, mais que se passe-t-il dans le petit monde des appels à texte ? Ce trimestre-ci, les aficionados du steampunk devraient trouver leur bonheur ! Mais que les autres se rassurent, il y en a pour tout le monde : de l’adepte du polar à l’amoureux de la mer, en passant par notre allié à tous, notre saint Graal, notre seconde moitié : le papier… Quel thème pourrait être plus approprié pour les plumes que nous sommes ? En ce mois d’octobre, voici pour vous ma nouvelle sélection de concours et d’AT !



[Appel à Textes] imaJn’ère 2014
Lien : http://www.phenomenej.fr/news/imajn_ere/concours-de-nouvelles-imajn-ere-201…
Organisateur : L’association imaJn’ère.
Genres littéraires : SFFF (science-fiction, fantasy et fantastique) OU Polar. Il s’agit de deux appels à textes mutuellement exclusifs.
Thème : Le texte doit se dérouler entre la fin du XIXe siècle et le début du XXe.
Longueur : Maximum 25 000 signes (cette limite est flexible).
Modalités de soumission : Pas de frais de participation. Envoi par mail.
Date maximum de soumission : 30 novembre 2013.
Bénéfice : Publication sans rémunération dans une anthologie. L’auteur recevra trois exemplaires du recueil et 30% de réduction sur tout exemplaire supplémentaire. Il conservera tous droits sur son texte.

[Appel à Textes] A voile et à vapeur
Lien : https://avoileetavapeur.wordpress.com
Organisateur : Les Editions Voy’el, pour leur Collection Y.
Genre littéraire : Uchronie à veine steampunk.
Thème : Le texte doit mettre en scène au moins un personnage homosexuel, bisexuel, pansexuel ou transsexuel.
Longueur : Maximum 50 000 signes.
Modalités de soumission : Pas de frais de participation. Envoi par mail.
Date maximum de soumission : Appel à textes permanent !
Bénéfice : Publication dans une anthologie annuelle au format numérique.

[Concours] Concours de la Nouvelle Maritime
Lien : http://escales-de-binic.over-blog.com/article-reglement-du-concours-des-esc…
Organisateur : Les Escales de Binic, festival du livre de la mer et de l’aventure.
Genre littéraire : Tous.
Thème : « Je connais cet horizon ».
Longueur : Maximum 10 pages.
Modalités de soumission : Pas de frais de participation. Envoi double : par mail et par courrier en 3 exemplaires.
Date maximum de soumission : 31 décembre 2013.
Bénéfices : Les textes des 5 lauréats ainsi que celui du prix des moins de 18 ans seront publiés dans un recueil collectif. De plus, les trois meilleurs textes recevront des dotations respectives de 500, 250 et 150€ ; le prix des moins de 18 ans recevra une dotation de 100€.

[Concours] Tu Connais la Nouvelle ?
Lien : http://www.tuconnaislanouvelle.fr/index.php?page=concours-de-nouvelles
Organisateurs : L’association « Tu Connais la Nouvelle ? » et la ville de Saint-Jean-de-Braye.
Genre littéraire : Tous.
Thème : « Papier(s) ».
Longueur : Maximum 10 000 signes.
Modalités de soumission : Frais de participation de 10€ payables par chèque. Envoi par courrier en 2 exemplaires.
Date maximum de soumission : 10 janvier 2014.
Bénéfices : Les trois grands prix recevront des dotations respectives de 400, 350 et 225€. En outre, les trois textes primés seront édités dans un recueil aux côtés d’auteurs nouvellistes reconnus.

A vos claviers !

Dragonwing

Dessine-moi une plume


Cette année, l'été n'est pas venu seul. Dans les librairies, attendue et chassée par une foule de fans éperdus, la Passe-miroir a été photographiée aux quatre coins de la France. Cette couverture représentant la Citacielle avec moult détails nous a tous fait revivre les instants magiques où Ophélie découvre la capitale du pôle. Mais avez-vous été assez curieux pour aller en quatrième de couverture et connaitre le nom de l'illustrateur ? Non ?



 

L'artiste du jour :

 
 
Aujourd'hui nous parlerons des travaux détaillés et vertigineux de Laurent Gapaillard.

L'homme :

Laurent Gapaillard a fait ses études de graphisme à l'école Met de Penninghen (ESAG) sur Paris puis a complété sa formation par une année à l'école du Louvre. Par la suite, il a travaillé sur des projets de séries et de films d'animation pour lesquels il a conçu et dessiné des décors. D'un point de vue illustration pure, Laurent Gapaillard a œuvré avec l'auteur Bertrand Santini sur "le YARK" aux éditions Ricochet-jeunes, puis sur la couverture des "Fiancés de l'hiver" aux éditions Gallimard jeunesse.

L'artiste :

Avant d'aller lire ce qui suit, je vous invite d'ores et déjà à observer son travail. Le premier point omniprésent est l'architecture qui mélange le vertige de la perspective, la profondeur des ombres, l'imaginaire mais en même temps une touche de réalisme qui donne envie d'y croire. Le goût de la texture et de la minutie donne aussi un côté fascinant aux illustrations. Une envie d'immersion.

L'autre élément qui me surprend beaucoup est le point de vue du dessin. Le plus souvent le dessinateur semble au-dessus du sujet, donnant ainsi ce côté instable, en suspension, comme si cela sortait de ses rêves et qu'il flottait au-dessus. L'immersion est donc assurée. De plus, la multitude de clins d'œil culturels évoque le passé aussi bien que le futur. Tout se mélange et malgré cela, chacun trouve son compte et sa part de rêve.





Je vous invite donc à aller fouiller aussi bien son blog que le site des agents associés.

Votre dévouée,

Saïph

Citations d'auteur

« Dans la vie on ne fait pas ce que l'on veut mais on est responsable de ce que l'on est. »

De Jean-Paul Sartre


« Enfer chrétien, du feu. Enfer païen, du feu. Enfer mahométan, du feu. Enfer hindou, des flammes. A en croire les religions, Dieu est né rôtisseur. »

De Victor Hugo dans Choses vues


« Le seul moyen de se délivrer d'une tentation, c'est d'y céder. Résistez et votre âme se rend malade à force de languir ce qu'elle s'interdit. »

D'Oscar Wilde dans Le Portrait de Dorian Gray


« Ne dites pas de mal du temps qu'il fait, s'il ne changeait pas, neuf personnes sur dix ne sauraient pas comment engager la conversation. »

De Charles Dickens


« L'espérance, c'est sortir par un beau soleil et rentrer sous la pluie. »

De Jules Renard dans Journal

Les Inspirateurs

Après la mythologie grecque et les éléments, je vous propose d'aller voir de plus près le monde de l'épée. Plus qu'une arme, cet objet fait partie de nos rêves d'enfant comme de notre passé. Cependant, devant l'étendu du sujet, je ne vous parlerai que de son anatomie et de son histoire jusqu'au Moyen-âge. Le reste fera l'objet d'un prochain article.

"L'épée, une arme qui répond à un besoin militaire et physique."

Qu'est-ce qu'on attend d'une épée ? Tout d'abord des critères liés à sa maniabilité. Il ne faut pas oublier que c'est une arme avant d'être un objet de légende. Une épée se doit d'être légère afin d'être maniable. De cela dépend l'espérance de vie lors d'un combat. Ainsi, une épée à une main pèsera environ 1 kg, et environ 2 kg pour une épée à deux mains. Oubliez donc le cliché de l'épée de 10 kg, ce n'est absolument pas réaliste. Cela me permet d'aborder un autre critère important : la lame. Elle se doit d'être relativement souple afin de mieux absorber les coups. Si ce n'est pas le cas, vous risquez de briser votre arme comme de vous traumatiser les articulations. Ce serait dommage d'être mis en échec par votre propre corps alors que vous avez affronté les pires ennemis que la Terre puisse porter. Un dernier critère et pas des moindres : l'épée doit être tranchante voire piquante. Avec une épée émoussée il va être plus difficile de remporter un tournoi comme un duel judiciaire.



"L'épée, une arme complexe mais équilibrée."

L'épée, c'est tout d'abord trois grandes parties. La garde (I), la lame (II) et le fourreau (III). Le fourreau est indissociable de l'arme car il protège le tranchant de ce qui pourrait l'endommager tout comme son porteur. Il serait fâcheux de se blesser avec sa propre arme.

Détaillons chacune de ces parties :

I. La garde.

Pommeau (1) : À la fois utile comme contrepoids pour assurer l'équilibre, il est aussi indispensable pour assommer un adversaire qui se serait avancé trop près.

Fusée (2) : Il se trouve que la lame se prolonge en s'affinant (la soie) afin de tenir ensemble chaque pièce de la garde. Pour ne pas avoir la main directement en contact avec le métal, on l'habille de cuir ou, si on a les moyens, de bois, corne, etc.

Quillons (3) : Une pièce salutaire de l'épée. Cela permet à la main de ne pas déraper en cas d'estoc, mais aussi de protéger la main si l'arme de l'adversaire venait à glisser en direction de vos phalanges. Éventuellement, les quillons peuvent servir d'arme à eux seuls. Il est bon de savoir que si vous êtes apprenti escrimeur, ce sont vos poignets qui souffriront au début de la piqure sèche de ce bout de métal.

Chappe (4) : C'est une pièce de cuir qui protège la lame de l'eau en faisant joint avec le fourreau quand l'épée est rengainée.

II. La lame.

Le double tranchant (7) : Contrairement au sabre ou au fauchon, l'épée a un double tranchant. Cette lame va être plus fine et tranchante au bout (8) que l'on appelle "le faible". Pourquoi le faible ? Eh bien, essayez de parer une attaque avec le bout de votre arme, vous comprendrez vite que même avec des muscles puissants, ce n'est pas possible : le "bras de levier" est trop important. Rassurez-vous, je vous ai vanté une arme équilibrée, alors s'il y a un faible, il y a un fort (5). Plus près de la garde, il devient aisé de parer les coups de l'adversaire. Voila une autre raison d'avoir des quillons.

La gorge (6) : Son utilité est double là encore, mais la deuxième n'est pas entièrement prouvée. Tout d'abord, cela permet d'alléger l'arme et d'améliorer sa résistance. Sinon cela permettrait d'évacuer le sang de l'adversaire. Et oui une épée c'est avant tout fait pour tuer, il ne faut pas l'oublier trop vite.

Il ne reste plus qu'à vous présenter l'arrête (9) et la pointe (10) très utile pour aller piquer son adversaire.

"La naissance de l'épée remonte à l'âge de bronze"

Dans la première moitié du IIème millénaire avant J.C., on retrouve la trace d’objet assimilables à des poignards plus qu’à des épées. Il faut attendre l’âge du Bronze moyen pour que les premières armes ayant la proportion suffisante pour être qualifiées d’épées apparaissent. On les obtenait d’un seul tenant en coulant le bronze dans un moule de pierre.

Age du Fer

La longueur d’une lame d’épée au début de cette période est d’environ 60cm. Il s’agit d’une arme polyvalente, de taille et d’estoc, utilisée aussi bien par les cavaliers que les fantassins. À l'abandon du char, l’épée devient l’arme principale du cavalier et subit des évolutions de forme : sa lame s’allonge et perd sa pointe pour permettre la taille.

Période romaine

Au premier siècle avant J.-C., sa morphologie est la suivante : bout arrondi et une lame de 90cm environ. Toutefois, les Celtes de la péninsule ibérique conservent l’épée courte, d’où viendrait probablement le glaive. A l’époque de l'empereur Auguste, le légionnaire dispose de l’équipement suivant : une lance et un pilum pour le combat à distance, un glaive et un poignard pour le corps à corps. L’épée longue (spartha), issue de l’armement de l’auxiliaire, supplante le glaive au IIème siècle après J.-C. et continue d’être utilisée avec peu de modifications jusqu’au début du Moyen-âge.

Moyen-âge

 
 
Au début du Moyen-âge, nous héritons donc d'une lame à la gorge large, des tranchants effilés parallèles ou presque et une pointe peu prononcée. Les frappes de taille sont donc avantagées. La lame de l’épée s’accroît progressivement en corrélation avec les évolutions techniques du bouclier. Outre la lame plus longue, la gorge se rétrécit, la garde se développe en envergure et s’incurve vers la lame. En parallèle à ces évolutions techniques, on commence à voir apparaitre dans la littérature les premiers termes d’escrime.

Au XIIIème siècle, certains écrits mentionnent les coups d'estoc, synonyme d'une pointe plus fine et d'un alliage plus solide.

Au XIVème siècle, la forte arrête médiane apparaît, tout en conservant bien sûr les capacités de coupe de la lame. La section losangique de celle-ci permet une meilleure technicité des tranchants. Selon l’usage, l’arme est soit destinée à l’escrime, soit (et surtout) pour abattre un homme en armure.

Nous voila arrivés à la fin de ce voyage. J'espère que cela vous a ouvert de nouvelles perspectives ou une meilleure compréhension de vos lectures.

Saïph

Paroles de Pro

Coucou les plumes,
Pour ce nouveau numéro du Paen, j’ai décidé de sortir des sentiers battus en vous proposant de découvrir un point de vue différent de ceux que l’on vous présente d’habitude à travers les témoignages d’éditeurs. En effet, aujourd’hui nous mettrons à l’honneur les librairies. Et une en particulier.

Niché au cœur de la forêt bétonnée des habitations parisiennes, se cache un arbre tout particulier qui un jour a troqué bois et sève contre la magie de l’encre et du papier. Il est alors devenu « L’Arbre à Lettres », une librairie de proximité qui, a contrario de nombre de ses frères et sœurs dont nous ne citerons pas les noms, ne se contente pas de vendre des livres. Sans attendre, rentrons donc tout de suite dans le vif du sujet :


1/ L’arbre à lettres, c’est une librairie parisienne qui se revendique avant tout comme un lieu de convivialité et de partage où l’imaginaire est roi et le conseil précieux. Un service humain qui fait toute la différence. Pensez-vous qu’à l’heure d’internet et du tout numérique, cette démarche soit une nécessité pour la survie des librairies classiques ?

• Oui, je pense qu'elle est primordiale. Avec ces nouvelles valeurs technologiques, la nostalgie du contact humain et de la proximité sont en hausse. Les gens utilisent de plus en plus de moyens de communication distants, et prennent l'habitude de faire leurs courses, leurs rencontres via des sites web. L'Arbre à Lettres est une librairie de quartier, riche de client habitués, et connue pour les bons conseils de ses libraires. On peut voir avec la triste fermeture des centres Virgin que les clients ne souhaitent plus de "supermarché" de la culture, mais plutôt un magasin où les conseils et les connaissances sont rois. Avec ma spécialisation, la jeunesse, le conseil et le coup de cœur sont nécessaires. Je lis sans arrêt et regarde les albums afin de prodiguer les meilleurs retours aux clients. Je suis loin d'être avare avec mes coups de cœur, car j'aime savoir mes clients autonomes, mais j'aime aussi conseiller et renseigner grands-parents, parents, oncle, tantes, amis et les enfants eux-mêmes.


2/ Vous devez fréquemment recevoir la visite des commerciaux des valeurs sûres de l’édition qui arrivent avec leurs best-sellers en devenir, mais qu’en est-il pour ce qui est des maisons d’éditions plus modestes ? Comment choisissez-vous les ouvrages de votre catalogue ? Qu’attendez-vous d’un livre ?

• En effet, nous voyons des représentants toutes les semaines. Ceux-ci nous présentent leurs catalogues et argumentent pour leurs livres. Je veille à avoir tous types d'albums et de romans en rayon. Des best-sellers, évidemment, mais aussi des premiers romans, des albums de type classique de Gallimard et des "albums à message" de Rue du Monde par exemple. Beaucoup de petits éditeurs (Courtes et Longues, Billeboquet, Frimousse, Alice...) proposent des albums au graphisme particulier ou aux sujets graves qui ne correspondent parfois pas à notre clientèle. J'essaie de choisir des livres de types différents qui me plaisent ou plairont à mes collègues et surtout à nos clients.


3/ Quelles difficultés rencontrez-vous le plus souvent ?

• Les gens braqués que sur leurs idées!!!!!!! Ils veulent un roman sur le football, sur les chevaux ou encore une belle histoire d'amour, et rien d'autre! Si nous n'avons pas de titres qui correspondent en rayon, on est foutu! Il est très frustrant de ne pas pouvoir combler un client par manque de titres ou par manque de curiosité. Sinon, le travail avec un représentant est souvent dur pour moi, car il faut prendre un "pari" sur un livre avec, parfois, très peu d'informations. Je rajouterai que lorsqu'on côtoie sans arrêt de belles couvertures et d'alléchants résumés, il est difficile de faire un choix ou de se résoudre à ne pas lire un roman par manque de temps.


4/ En tant que libraire, vous êtes l’ultime maillon entre l’auteur et le lecteur. A ce titre, vous devez bien connaitre les envies des lecteurs, arrive-t-il aux maisons d’éditions de vous demander votre avis sur les nouvelles tendances ?

• Jamais. Ce sont eux qui crée la tendance! Pocket a sorti Hunger Games il y quelques années, et depuis, la dystopie fleurit. Pareil pour la saga Twilight. Les éditeurs produisent, ils savent que les adolescents aiment lire des romans de mêmes thèmes et de mêmes structures. Ma collection pour adolescent préférée est "Scripto", chez Gallimard. Ils publient beaucoup de romans historiques, souvent à thèmes difficiles, comme "Max" qui parle du nazisme du point de vue d'un enfant arien ou comme "La Décision", magnifique roman sur le déni de grossesse. J'aime ces thèmes à contre-courant. Il m'arrive quand même souvent de parler d'une collection ou d'un roman avec mes représentants. J'ai également déjà rencontré les éditrices de la collection MSK chez le Masque, par exemple, qui m'ont présenté leur ligne éditoriale et se sont intéressées au goût de mes clients.


5 / Une fois un livre choisi, commandé et arrivé dans votre librairie tout en encre et en papier, comment se déroule la phase de promotion ? Vous arrive-t-il d’organiser des séances de lecture comme cela se pratique aux USA, ou des séances de dédicaces, ou l’auteur doit rester un inventeur mystérieux tapi dans l’ombre de ses pages ?

• Un inventeur mystérieux tapi dans l'ombre de ses pages... Très belle formule! Il nous arrive de faire une rencontre avec des auteurs. Depuis que je travaille à l'Arbre à Lettres, j'ai surtout rencontré des auteurs de littérature adulte. Nous avons quand même invité Geronimo Stilton et une écrivain et dessinatrice célèbre, Gerda Müller, viendra signer chez nous fin octobre. Un de mes buts à long terme et d'organiser plus de rencontres avec des illustrateurs et écrivains pour enfants et adolescents. Mon rêve ultime serait de recevoir Jean-Claude Mourlevat, mon idole! Je suis "pour" la rencontre auteur-public. L'auteur doit être disponible, selon moi, pour partager son travail et répondre aux questions de ses lecteurs.


6/ Christelle Dabos, l’auteure de la Passe-Miroir et gagnante du concours premier roman de Gallimard est à l’origine une perle du net. Envisageriez-vous de travailler un jour en collaboration avec des auteurs du web qui s’auto-publient afin de promouvoir ces talents issus des nouvelles technologies ? Est-il possible à votre échelle de commercialiser de tels ouvrages ?

• Il m'est difficile de vous répondre, car c'est notre gérant qui s'occupe de ces cas-là. Mais nous sommes toujours d'accord de voir un livre et il nous arrive de prendre des titres en dépôt.


7/ Avec l’avènement des tablettes tactiles et autres liseuses, le livre a changé, troquant son encre et son papier contre un format électronique que d’aucuns trouveront plus pratique. Que pensez-vous du livre numérique ?

• Je ne suis pas contre les nouvelles technologies, elles ont des avantages comme le gain de place ou le prix. Cependant, pour moi, rien ne peut remplacer l'"objet livre" et le papier. J'aime voir mon avancée dans un roman, revenir en arrière, et sentir les pages qui ont toutes des odeurs différentes. Je suis une amoureuse, que voulez-vous!


8/ Quel conseil donneriez-vous aux jeunes auteurs qui souhaitent tenter leur chance auprès des maisons d’édition ? Quels sont les pièges à éviter ?

• Ne pas aller vers des éditions Internet, par exemple. Celles-ci sont souvent éditées à compte d'auteur donc les librairies ne peuvent pas les commander, les titres ne se trouvent que via le site web. Il faut également bien se renseigner sur les lignes éditoriales des maisons d'éditions. Par exemple, MSK du Masque ne publie presque que des thrillers ou de la fiction, Doado au Rouergue publie principalement des récits initiatiques ou de vie, etc... Finalement, il est primordial de ne pas se décourager. Même s'il est parfois difficile d'entendre des critiques sur son oeuvre, son "bébé", il ne faut pas hésiter à retravailler son style, sa syntaxe, sa structure, et à persévérer! Pensez à Christophe Mauri qui a envoyé son premier manuscrit à Gallimard à l'âge de treize ans et qui a fini par publier à vingt-deux ans l'excellent Mathieu Hidalf!


9/ Enfin, pour finir sur une note plus originale, quelle est la requête la plus incongrue que l’on vous ait soumise ?

• Alors ça... Il y en a des tonnes à raconter! Il y a d'abord ce qu'on appelle des "Perles de Librairie", c'est à dire les jolies fautes ou 'emmêlage" d'étudiants ou de parents (comme La Banquette de Platon, Germinable, Le Cidre de Corneille, Cyrano de Bergerac de Molière... Que du véridique!) Sinon, j'ai de nombreux clients qui me demandent, lorsque j'emballe un livre dans du papier cadeau, de laisser un côté ouvert afin qu'ils le lisent avant... Je ne me suis toujours pas habituée à ça! Finalement, voici une de mes plus belle perle, d'il y a six mois:

Une cliente me demande le livre du fils de "celui qui a écrit Les Voyages de Gulliver". Sur le coup, je suis sonnée, je ne connais pas de fils écrivain à Jonathan Swift. Directement, je panique un peu et recherche sur Wikipedia et Internet afin de répondre au plus vite à ma cliente. Elle s'impatiente et me dit sèchement que je devrais le connaître car il connait un franc succès avec son dernier livre. Arrêt "Euh... Madame... Vous savez que Jonathan Swift est mort au 18ème siècle?" Elle cherchait Graham Swift, qui n'a aucun lien avec Jonathan.


10/ Allez une dernière pour la route ! Nous n’avons jamais visité les coulisses cachées d’une librairie : aimeriez-vous nous parler d’une ou plusieurs activité(s) mal connue(s) du public et qui participe(nt) au charme de cette profession ?

• La librairie est un métier qui prend beaucoup de temps. On lit le soir ainsi que pendant nos congés. Il est difficile d'être libraire à moitié, car c'est un état d'esprit. Parlons des rencontres avec les éditeurs! Depuis neuf mois, j'ai assisté à quatre rencontres éditeurs, que ce soit pour parler d'un roman d'adolescent qui a bouleversé ses éditeurs (Nos Etoiles Contraires, Nathan), pour le programme de Noël (Bayard) ou pour le vernissage du dernier album d'un célèbre illustrateur (Marc Boutavant pour Edmond, la fête sous la lune) On y croise des journalistes ou d'autres libraires de milieux complètement différents, on partage, on débat... Ce sont des moments très enrichissants.

Et voilà Plumettes et Plumeaux, c’est déjà fini. Nous remercions chaleureusement Madame Valentine pour sa participation et ses réponses vraiment intéressantes. Pour celles et ceux qui souhaiteraient découvrir plus en détails ce fameux arbre si particulier, je vous invite à consulter leur site internet : http://www.arbrealettres.com/

A bientôt pour un nouveau Paroles de Pros. C’était Shao déjà en quête d’interviews inédites.


Shaoran

Spécial Festival du Livre de Mouans-Sartoux



Vendredi 4 octobre 2013 - 9h30. Ici Cricri, votre dévouée plumeporter, envoyée en mission spéciale au Festival du Livre de Mouans-Sartoux. Je viens de retirer mon badge à l’accueil. Je vais profiter de ma couverture d’auteur pour pénétrer dans les coulisses de l’espace Jeunesse et vous révéler comment se passe un événement du genre, vu de l’autre côté des stands.


Le Festival a investi le centre ville de Mouans-Sartoux. À ciel ouvert, ce sont les marchands de livres d’occasion qui se sont installés sur chaque pan de trottoir. Tandis que je cherche l’espace Jeunesse où je dois me rendre, je vois déjà défiler un nombre impressionnant de vieux livres. Le temps est dégagé, l’atmosphère lumineuse, la ville empreinte d’un charme ancien. Le gymnase, la médiathèque et le cinéma sont réquisitionnés pour l’occasion, mais moi, je dois aller plus loin encore. Là, j’y suis ! Un grand chapiteau blanc est pris d’assaut par des bus scolaires. Je me faufile au milieu des enfants, présente mon badge et cherche l’emplacement de mon stand.


Vendredi 4 octobre 2013 - 10h00. Voilà, je suis installée devant une forteresse de romans flambants neufs… et un tantinet dépitée. Sur le programme, j’avais vu que je partagerais le stand avec quatre autres auteurs dont il me tardait de faire la connaissance : pour le moment, je suis seule. Seule avec ma timidité d’auteure débutante. Seule devant le va-et-vient des classes qui déambulent le long des autres stands : les albums, les imagiers et les illustrateurs attirent davantage l’intérêt des enfants que les romans pour grands. Enfin non, c’est incorrect, je ne suis pas vraiment seule. Deux jeunes hommes représentent la librairie qui héberge le stand ; ce sont eux qui feront les encaissements et ils me proposent déjà de quoi boire. Je décline poliment. J’ai l’estomac noué de stress, une vraie bleusaille !

Vendredi 4 octobre 2013 - 11h00. Youhou, ça commence à s’animer ! Les institutrices m’amènent des groupes d’enfants pour qu’ils me posent quelques questions. Comment vous appelez-vous, madame ? Qu’avez-vous écrit, madame ? Quel est votre genre de roman, madame ? Vous écrivez depuis quand, madame ? Quel est votre livre préféré, madame ? Armés d’un calepin comme des mini-journalistes, ils notent consciencieusement mes réponses. Il y a parfois de drôles de quiproquo : j’ai parlé de ma fanfiction sur Harry Potter et les enfants se sont persuadés que j’étais J.K.Rowling en personne. Je fais mes toutes premières dédicaces pour des institutrices et des bibliothécaires qui m’ont lue cet été et qui m’encouragent à continuer sur cette voie. Je vais faire de mon mieux, mesdames !

Vendredi 4 octobre 2013 - 12h00. Pause déjeuner. Je quitte le chapiteau en compagnie d’un autre auteur jeunesse de mon stand, Thomas, le premier dont je fais enfin la connaissance. Le temps que nous traversions la vieille ville, j’apprends qu’il a 18 ans, que le lancement de son premier roman démarre au quart de tour et qu’il a été interviewé par TF1 la veille au soir. Mama mia, il fallait que je tombe sur un petit génie ! Il dégage une telle assurance que j’ai l’impression qu’on a interverti nos âges. Le déjeuner se déroule dans le parc du château de Mouans-Sartoux : le cadre est d’un charme fou et l’air sent bon le Midi de la France. À notre table, d’autres auteurs ne tardent pas à se joindre à nous. On échange nos premières impressions et j’ai le sentiment que beaucoup se connaissent déjà. Je manque de m’étouffer avec mon taboulé en écoutant ma voisine de gauche : elle écrit de trois à cinq romans par an ! Tout en mastiquant mon repas, je suis absolument subjuguée par ces écrivains expérimentés, drôles, bons vivants et chaleureux qui siègent à côté de moi. Je culpabilise un peu de ne connaître aucun des noms écrits sur les badges et je me promets d’être plus curieuse à l’avenir.

Vendredi 4 octobre 2013 - 15h00. Je viens de commettre mon premier cafouillage. Les visites de classe continuent et cet après-midi, ce sont les collégiens qui défilent. Certains viennent me poser des questions pour le journal de leur école, ils sont d’un professionnalisme impressionnant ! À force de répondre à des questions très simples, j’ai baissé ma garde, j’avoue. Et puis voilà, j’étais en pleine digestion, je commençais presque à somnoler, vous comprenez ? Bref, tout ça pour justifier mes inavouables bégaiements quand deux adolescentes-journalistes sont venues vers moi pour m’enregistrer sur leur iPhone : « Qu’évoque pour vous la naissance d’un livre ? » Si un auteur doit être éloquent, je crois que je viens de faire une tache indélébile sur la réputation de toute la profession. Résolution du moment : rentrer à la maison, dormir comme une souche et être plus concentrée demain !

Samedi 5 octobre 2013 - 10h00. Je commence à me demander sérieusement si je suis dans le coup. Mon camarade de stand, Thomas le surdoué, vend livre sur livre alors que je passe, moi, presque complètement inaperçue. Comment puis-je rivaliser avec ce jeune homme plein de feu, qui harponne et aimante tous les visiteurs à grandes exclamations, qui les fait rire, qui les emballe, qui les convainc que son livre est un incontournable du genre ? Cet auteur est doublé d’un vendeur dans l’âme. Moi et mes pauvres sourires, on ne fait pas le poids. Mon dieu, sont-ils tous comme lui ?

Samedi 5 octobre 2013 - 14h30. J’ai la réponse à ma question. Les autres auteurs du stand sont arrivés en cours de journée et je m’aperçois que chacun a une approche du public totalement différente. Hop, je sors mon petit carnet mental et je prends note !

Cendrine, l’une des co-auteures des déjà célèbres « Oksa Pollock », m’explique qu’un auteur doit savoir s’entourer de mystère, ne pas entrer dans une relation copain-copine avec ses lecteurs, que cette juste distance fait partie du charme de la profession. J’écoute son expérience sur les précédents salons auxquels elle a participé et je ne la sens pas tellement emballée par celui-ci. Je trouve formidable qu’elle écrive en binôme avec une autre auteure. Elles se mettent à deux pour monter une histoire, l’une écrit le premier jet d’un chapitre, l’autre l’étoffe, etc. Elle et sa partenaire ont une affinité si forte qu’en lisant le livre, on ne ressent pas deux mais une seule âme tapie derrière l’histoire.

À ma gauche se tient Philippe : c’est un auteur de best-sellers connu pour ses polars pour adultes, mais il s’est récemment lancé dans des romans d’ados (en plus soft ou en moins trash, ça dépend sous quel angle on considère la chose). Cet homme possède une douceur, une discrétion et une humilité qui l’auréolent de ce mystère fascinant dont me parlait Cendrine. Il est tout le temps en train d’écrire : quand ce n’est pas pour faire ses dédicaces, il griffonne des notes dans un beau cahier de cuir. C’est l’incarnation même de l’écrivain traditionnel.

Enfin, il y a Marilou, l’auteure de « la Lune mauve », avec qui j’ai très rapidement sympathisé. Elle a une personnalité proche de la mienne, avec une touche d’expérience en plus. J’ai su qu’on allait s’entendre dès qu’elle a renversé son verre d’eau sur la table pour la deuxième fois consécutive. Marilou, c’est l’exemple même de l’écrivain en phase avec son époque : un iPad dans une main, un iPhone costumisé dans l’autre, elle maîtrise les nouvelles technologies sur le bout des doigts. Elle n’hésite pas à donner son mail personnel à des jeunes qui lui demandent des conseils d’écriture. À moi, elle file des petites astuces pour personnaliser les dédicaces : une couleur de stylo en rapport avec le livre (mauve pour elle, en l’occurrence) et un petit tampon personnalisé. Je trouve ça trop fort ! Elle me fait part de son propre ressenti d’auteur, le stress inhérent aux attentes des lecteurs quand on écrit la suite d’une saga, le décalage entre l’avant édition et l’après édition. Je me reconnais beaucoup dans son témoignage, c’est très réconfortant.

Dimanche 6 octobre 2013 - 17h30. Le festival touche à sa fin. J’ai beaucoup gagné en assurance au fil du temps et des rencontres. J’ai pu faire la connaissance de mes lecteurs, acquis ou à venir, et mes petites dédicaces sont devenues de moins en moins tremblotantes. J’ai aussi appris à m’adapter au type de public qui s’adresse à moi : parler d’ambiance Fantasy Steampunk à une mère de famille, ça ne lui évoque strictement rien ; par contre, lui dire que mon univers est proche du « Château Ambulant » de Miyazaki, là, ça fait mouche à tous les coups ! J’ai aussi appris qu’en matière de littérature jeunesse, venir à un Salon armé d’un simple stylo noir, c’est un peu prosaïque. Les autres auteurs offraient des affiches, des marques-pages, des extraits gratis, ou faisait des dédicaces personnalisées… ça aussi, ça fait partie du rêve.


Mais ce que je retiens surtout de cette expérience, ce sont les échanges humains : des adolescents en quête d’évasion, des grands-parents qui veulent donner le goût de la lecture à leurs petits-enfants, des illustrateurs et des auteurs amateurs qui essaient de se lancer. Je me suis finalement rendue compte qu’un Festival, ce n’étaient pas les auteurs d’un côté du stand et les lecteurs de l’autre. C’est avant tout une réunion d’amoureux des livres.

Cristal